L’Affaire MOUNZÉO-MACKOSSO: Une tentative avortée de déstabilisation de la société civile indépendante.
Le 14 juin 2010, un événement sans précédent impulsé par des acteurs de la société civile congolaise avait secoué et mobilisé tout le gotha politico-administratif, le patronat et les chancelleries accréditées au Congo Brazzaville.
L’événement n’était autre que la présentation du premier rapport indépendant sur les recettes pétrolières certifiées de la République du Congo pour la période courant de 2004 à 2006, rapport produit par le cabinet d’avocats parisiens GHELBER et GOURDON dans le cadre de la mise en œuvre de l’Initiative sur la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE).
Lancée à Johannesburg en juin 2002 par l’ancien Premier ministre britannique Tony BLAIR pour accroître la transparence dans les revenus issus des industries extractives et promouvoir leur utilisation judicieuse par la bonne gouvernance, cette initiative avait été, on s’en souvient, à la base de l’infortune de Christian MOUNZÉO et de son ami Brice MACKOSSO. Deux membres actifs et déterminés de la société civile indépendante du Congo Brazzaville qui n’ont dû leur salut et la vie sauve qu’au soutien énergique de l’ancien président de la Banque Mondiale, l’américain Paul WOLFOWITZ, un « faucon » de l’administration John W. BUSH Jr. dans la guerre contre le régime de Saddam HUSSEIN en Irak.
Installés à la tribune d’honneur aux côtés des représentants du gouvernement et des sociétés pétrolières, Christian MOUNZÉO et Brice MACKOSSO semblaient goûter intensément et avec délectation ce moment historique consacrant la légitimité de leur engagement en faveur de l’ITIE. Pendant ce temps, leur contempteur William BOUAKA essayait en vain d’attirer un peu d’attention sur sa petite personne. Menée avec la complicité active de Maître Médard NKÉLÉ, ancien stagiaire du cabinet Petro devenu un avocat à la réputation sulfureuse compromis qu’il était dans diverses magouilles à Pointe Noire avec ses clients et patrons d’origine ouest africaine à qui il devait d’ailleurs son cabinet à l’immeuble Pharmacie Santé, la croisade haineuse de William BOUAKA contre les deux figures emblématiques de la société civile congolaise s’était soldée par un échec cuisant.
Sous la pression de la Banque Mondiale et du FMI, par décrets n°2006-626 et 2006-627 signés en Octobre 2006, Denis SASSOU NGUESSO avait fixé la création, l’organisation et les attributions du Comité exécutif – l’organe national chargé de la mise en œuvre de l’ITIE placé sous l’autorité du ministre des Finances et du Comité consultatif – l’organe de conseil dans la mise en œuvre de l’ITIE placé sous l’autorité du ministre des Hydrocarbures, et nommé les membres des deux organes.
Christian MOUNZÉO avait été nommé Vice Président du Comité exécutif, Brice MACKOSSO membre. Dans la salle des conférences du ministère des Affaires étrangères où sera lancée, quatre ans après, la campagne d’information et de sensibilisation sur la mise en œuvre de l’ITIE assortie de la présentation du premier rapport indépendant sur les recettes pétrolières certifiées de la République du Congo Brazzaville, le camouflet infligé par les décrets présidentiels susmentionnés venait de prendre les allures d’un cinglant désaveu.
Muré dans la solitude, le rictus amer et le sourire jaune, William BOUAKA avait lâché : « Ils ne sont là que provisoirement ; ils me préparent la place ». Maigre consolation, tant ces mots sonnaient comme l’épitaphe d’un mercenaire tombé sans panache sur le champ de bataille.
Un procès politique ayant pour enjeu l’ITIE ?
Présenté comme une affaire de droit commun, y compris par nous-mêmes, la plainte pour « détournement des fonds, faux et usage de faux et abus de confiance » de William BOUAKA contre Christian MOUNZÉO et Brice MACKOSSO devant le tribunal de Pointe-Noire était en réalité une affaire éminemment politique.
Le retentissement médiatique disproportionné qu’elle avait connu par rapport aux griefs formulés, les brimades physiques et psychologiques subies – perquisitions des domiciles, détention à la maison d’arrêt de Pointe-Noire, assignation à résidence, surveillance policière et autres -, l’implication des plus hautes autorités de l’Etat : Autant des symptômes du climat de « complot » lié à cette affaire.
Petite partie émergée d’un complot plus vaste visant la déstabilisation, la caporalisation et l’anéantissement de la société civile indépendante du Congo Brazzaville, le procès de Pointe-Noire visait ni plus ni moins que la disqualification de ces deux icônes de la société civile par leur condamnation et la déchéance de leurs droits civiques. Ce qui aurait constitué un coup mortel au processus de mise en œuvre de l’ITIE, particulièrement dans le secteur pétrolier. A contrario, il s’agissait d’encourager et de grossir les effectifs de la société civile inféodée au pouvoir.
Ce n’est pas un hasard si Germain Cephas EWANGUI (un fonctionnaire du ministère des affaires étrangères qui n’a jamais été en poste), président de l’Association Panafricaine Thomas SANKARA (APTS), chef de file des « collabos » de la société civile, avait pris fait et cause pour William BOUAKA. Après une promenade de santé à Pointe Noire, celui-ci avait déclaré à son retour à Brazzaville dans les colonnes de La Semaine Africaine (dont le Directeur de publication Joachim MBANZA a toujours été un indic patenté qui émarge chez le général Jean François NDENGUET), que le procès intenté contre Christian MOUNZÉO et Brice MACKOSSO était « une simple affaire de droit commun ».
Est-il nécessaire de signaler que l’ONG de Germain Cephas EWANGUI est l’œuvre du général Pierre OBA, le tout puissant ministre de l’Intérieur chargé de l’organisation de l’élection présidentielle de 2002 qui faisait face à l’époque à la fronde de la société civile indépendante incarnée par l’Observatoire congolais des droits de l’Homme (OCDH) avec à sa tête un bouillant jeune homme nommé… Christian MOUNZÉO ?
Faut-il rappeler que le soit disant Forum de la société civile pour les élections libres (FOSOCEL) lancé au centre d’information des Nations Unies par Germain Cephas EWABGUI avait été financé en sous main par le Conseil National de Sécurité et lui avait donné l’opportunité de s’acheter une petite voiture Toyota couramment appelée à Brazzaville « cuisse de poulet » ?
Pour la tenue de ce forum en trompe-l’œil Germain Cephas EWANGUI avait perçu, selon ses propres dires, 10 millions de FCFA des mains du général Jean François NDENGUET et rétrocédé 3 millions de FCFA de commissions.
Drôle d’affaire de droit commun où les avocats du plaignant sont payés par des personnalités politiques ou militaires ! Une partie des honoraires de Maître Marcel NGOMA, premier avocat constitué en faveur de William BOUAKA sur notre recommandation et par nos soins, avait été supportée par le ministre Alain AKOUALA ATIPAULT, tandis que les honoraires du cabinet de Maître Jean PÉTRO, entré dans la danse en cours de procédure, avaient été pris en charge par le général Jean François NDENGUET.
C’est à cette occasion que William BOUAKA se liera d’amitié avec Maître Jean Louis LABARRE et Maître Lionel KALINA MENGA, anciens avocats associés au cabinet Pétro, se découvrant opportunément un lien de parenté avec Maître Lionel KALINA MENGA qui doit son nom à sa naissance dans cette grande commune de l’ex Léopoldville actuelle commune de la Gombe dans la ville de Kinshasa.
On imagine mal le Ministre Alain AKOUALA ATIPAULT ou le Général Jean François NDENGUET payer les honoraires d’avocat d’un individu dans un long procès très médiatisé juste pour ses beaux yeux ou par un accès de générosité. Il ne faut pas rêver…
Le procès intenté à Pointe-Noire contre Christian MOUNZÉO et Brice MACKOSSO était également une affaire politique du fait de ses ramifications avec une affaire d’Etat particulièrement « sensible » à l’époque : l’affaire dit « des fonds vautours ». Ces créanciers privés anglo-saxons de l’Etat congolais avaient la particularité de se servir sur « la bête » en arraisonnant les cargaisons pétrolières de la Société Nationale des Pétroles du Congo (SNPC). D’où le jeu de cache-cache qui s’en était suivi, l’Etat congolais ayant monté des sociétés-écran immatriculées dans des paradis fiscaux pour soustraire son pétrole à d’éventuelles saisies.
Dénoncée par les « fonds vautours » complètement « bluffés » par la pieuvre, l’opacité née de cette pratique s’était également heurtée à la désapprobation de la coalition des ONG œuvrant pour la transparence des revenus dans les industries extractives qui l’avait publiquement manifesté en publiant en 2004 « l’Enigme du Sphinx », un rapport de Global WITNESS rédigé sous la houlette du Dr Sarah WYKES.
Il n’en fallait pas plus pour mettre sur la liste noire du régime les membres de la coalition « Publiez Ce Que Vous Payez » travaillant pour la mise en œuvre de l’ITIE, surtout que les « fonds vautours » avaient réussi l’exploit de donner des insomnies aux plus hautes autorités de l’Etat et de la SNPC, créant une véritable crise de paranoïa.
Or, Christian MOUNZÉO et Brice MACKOSSO étaient au niveau local les points focaux de cette coalition mise à l’index pour des raisons touchant « à la sécurité de l’Etat ».
Dans la bataille engagée pour faire échec aux « fonds vautours », le régime de Brazzaville avait un atout dans sa manche : Une superbe « taupe » très au parfum des accointances de la diaspora congolaise en France avec cette coalition d’ONG regroupée dans la plateforme « Publiez Ce Que Vous Payez ».
Tapie au cœur de la diaspora, cette « taupe » avait réussi un coup « fumant » en faisant via Paul SONI BENGA – un proche- et le ministre Alain AKOUALA ATIPAULT une véritable mine d’informations confidentielles en principe « verrouillées ». Elle avait livré des noms, des rapports et des e-mails des activistes les plus en vue et vendu la mèche de tout se qui se tramait à Paris. Bref, elle avait déstabilisé tout un réseau où se retrouvaient en première ligne Sarah WYKES et Maître William BOURDON !
Le 7 avril 2006, lorsque la nouvelle de l’arrestation de Christian MOUNZÉO et de Brice MACKOSSO est tombée sur les téléscripteurs des agences de presse, c’est la même taupe qui informera le ministre Alain AKOULA ATIPAULT qu’il allait s’organiser une manifestation de « protestation » à Paris. Cette « taupe », Guy MAFIMBA MOTOKI, gravite maintenant autour du pouvoir à Brazzaville et occupe les fonctions de conseiller auprès du ministre Mathieu KANI de l’industrie touristique où il sert de guide touristique (quel gâchis).
Roulé dans la farine par le ministre Alain AKOUALA ATIPAULT, un « kleptomane » de première classe qui n’a d’égal au gouvernement que son homologue Thierry LIEZIN MOUNGALLA, chichement rétribué par un poste subalterne, définitivement grillé sur la place de Paris, Guy MAFIMBA MOTOKI se console comme il peut. Pendant les festivités du cinquantenaires des indépendances il avait été chargé de servir de guide occasionnel à la famille DOLISIE qui veut aussi un monument à sa gloire à Brazzaville comme celui de SAVORGNAN DE BRAZZA. Guy MAFIMBA MOTOKI n’a pas fini d’expérimenter, ainsi qu’il l’avoue lui-même, l’amertume de sa « trahison » ; d’ailleurs Motoki en lingala signifie Sueur…
William BOUAKA cheval de Troie de l’opération anti-MOUNZÉO
Lorsque des dissensions internes relatives à la gestion éclatèrent fin 2005 au sein de la Rencontre pour la paix et les droits de l’Homme (RPDH), l’ONG de Christian MOUNZÉO et atteignirent la sphère publique par les bons soins de William BOUAKA, le demi-frère du député Claude Abraham MILANDOU, le pouvoir se saisit de la brèche ouverte pour l’élargir et lancer la chasse à l’homme.
Une longue chasse à courre aux multiples rebondissements où les chasseurs avaient été autorisés à utiliser des armes non conventionnelles. Un permis de tuer avait quasiment été délivré pour terrasser le ténor de cette « arrogante » société civile congolaise indépendante.
Par son action « téméraire et vexatoire » contre Christian MOUNZÉO et Brice MACKOSSO, William BOUAKA avait été le cheval de Troie utilisé – avec son consentement – pour cette action pernicieuse. Il avait ainsi volontairement traversé la rue et rejoint de son plein gré les rangs des « collabos » et des « indics », allant jusqu’à se ridiculiser en s’affublant du titre de « policier ».
Le retentissement médiatique disproportionné que cette affaire avait connu par rapport aux griefs formulés et les sommes ridicules prétendument détournées qui n’excédaient pas 20 millions de F CFA dans un pays où des milliards sont détournés et des cargaisons de pétrole disparaissent chaque jour sans émouvoir qui que ce soit et sans poursuite administrative ni judiciaire démontre la machination politique et l’instrumentalisation des protagonistes.
Là se trouve le soubassement d’un procès dans le procès ; un procès qui n’a jamais dit son nom, sans compter le fait que Christian MOUNZÉO était depuis longtemps dans le collimateur à cause de l’affaire des disparus du Beach qu’il avait contribué à largement médiatiser durant son mandat de secrétaire général de l’OCDH, ONG affiliée à la FIDH et partie civile dans la procédure toujours pendante engagée depuis 2001 devant la justice française…
Christian MOUNZÉO, on se rappelle, avait été aussi à la base d’une autre affaire très médiatisée à l’époque aujourd’hui tombée dans les oubliettes : le « charnier de MBANDZA NDOUNGA ». Un dossier qui avait obligé le ministre de l’époque, Maître Jean Martin MBEMBA, à descendre lui-même sur le terrain avec des journalistes dont Mathieu GAYELE de « La Rue Meurt ».
L’odyssée de l’affaire MOUNZÉO-MACKOSSO impose de tirer au moins une leçon : un pays post conflit comme le Congo Brazzaville n’avancera sur la voie de la paix durable et du progrès que si les dirigeants politiques et militaires comprennent et encouragent le rôle de la société civile indépendante dans la défense et la promotion des droits humains pour un exercice libre et pacifique des droits à travers le respect des textes et des lois.